Californie – Face au Pacifique
Le Pacifique, on avait fini par en rêver alors qu’on traversait les contrées entre Las Vegas et la Sierra Nevada. Le désert, nous en avions rêvé aussi, mais retrouver un peu de verdure et un climat océanique comme à la maison, ça avait quelque chose de rassurant.
Le Pacifique comme l’Atlantique
Maintenant on y était et il fallait voir le tableau. Cayucos, Californie, l’accès à la jetée était fermé pour cause de travaux. Sur une plage de gros sable, il ne faisait pas spécialement chaud, des surfeurs pliaient le matos, quelques promeneurs, deux chiens qui se sentaient le cul, et nous avec notre maigre casse dalle, fruit de recherches dans la multitude de sacs de course qui encombraient l’arrière de la voiture. Un paquet de pain de mie, une tomate et une quinzaine de fines tranches de rôti de dinde, transpirantes bien sûr. On mâchait tout ça en silence, le plus perspicace d’entre nous lâcha un « Le Pacifique, ça ressemble vachement à l’Atlantique » philosophe et un rien désabusé. Une vaste étendue d’eau sûrement salée surmontée de nuages gris, effectivement, il y a un air malgré les vagues ridicules.
L’après midi fut peu productif. Dans un Mc Do à la machine à café en panne, on avait cherché des plans pour plus tard. On était passé dans des bleds où on avait décidé de ne pas s’arrêter. Des campings étaient en fait des parcs à camping-cars au minimum pachydermiques. Bref quand ça va pas, on se réfugie dans la bouffe. On remplit la voiture avec des chips, un poulet rôti, un pack de douze, et petit plaisir, une bouteille de rouge californien « Ménage à trois » fort gouleyant. Plus au sud, le ciel se dégageait virant au bleu intense et camping nous trouvâmes, à El Capitan State Beach, ça sonne bien. Un barbeuc’, un point d’eau, un peu de végétation, et le Pacifique en bas du talus, que demande le peuple ?
Plus à l’Ouest, il y a l’Est
Le ciel rougit, le soleil se couche sur El Capitan. On décapsule les bières, on fait des photos comme des touristes que nous sommes, nos ombres face au décor de rêve. Le Pacifique, c’est quelque chose quand même, on prend conscience qu’on est à l’autre bout du monde. Chez nous, face à l’horizon, on dit aux enfants que si on nage longtemps, qu’on va en Amérique, qu’on a qu’à toucher la statue de la Liberté et revenir. Là, si on nage longtemps, on va tellement à l’Ouest qu’on arrive à l’Est. Sauf qu’on est pas des enfants, le tableau est émouvant. Qu’en ont pensé les premiers Européens qui ont foulé cette plage, eux qui avaient aussi traversé un océan et un continent pour en arriver là, certes sans avion ? Qui était El Capitan ? A-t-il lui aussi trouvé l’eau froide ?
Et si on mangeait ? Retour au campement à la lumière de la frontale, la nuit désormais noire, des canettes vides dans les poches. Là sur la table, ça couine, ça bouge ! Des putois à l’attaque du poulet !